Je réfléchis avec mon Crayon
Berberian : Comment as-tu compris que le dessin allait devenir
quelque chose d’important pour toi ? Comment étais-tu
perçu en classe ? A l’école, pour nous, il y avait le premier
de la classe, celui qui courrait vite… et le dessinateur,
qui était considéré comme un extra-terrestre.
Swarte : J’occupais cette position de celui fort en dessin.
Souvent des élèves me demandaient de leur faire des dessins
dans leurs carnets, mais je ne savais pas que cela pouvait être
une profession. Dans les revues, à la maison, on ne voyait jamais
apparaître les noms des dessinateurs ou des illustrateurs. Mes parents
m’ont poussé dans la direction du dessin industriel parce que
j’aimais la technique, les sports automobile, le vélo, et le dessin !
Plus tard, à la fin des années 60, les choses ont changé, surtout
grâce à Crumb. On ne disait pas que l’on achetait le dernier Mister
Natural, mais que l’on achetait le dernier Crumb. Avec Willem, c’est
devenu la même chose. J’ai pris conscience de la notion d’auteur/
dessinateur à ce moment-là, et j’ai compris qu’il était possible de tout
raconter à travers le dessin, que ce métier n’était pas uniquement
fait de commandes.